19/01/2015

«Dans la peau d’une djihadiste»: le témoignage terrifiant d’une journaliste infiltrée

Anna Erelle (prénom d’emprunt) est une journaliste française ayant infiltré le réseau de recrutement des djihadistes. Elle a témoigné dans «Salut les terriens», l’émission de Canal +, ce samedi soir.

Anna Erelle ne s’attendait sans doute pas à ce que la sortie de son bouquin coïncide à ce point avec la triste actualité. Journaliste d’investigation, elle s’est infiltrée dans le réseau de recrutement des djihadistes et a écrit un bouquin à ce sujet. Il est sorti le... 8 janvier, soit le lendemain de la fusillade de Charlie Hebdo. Hier, sur Canal +, Anna Erelle, qui utilise un prénom d’emprunt en raison des menaces qui pèsent sur sa tête, a témoigné sur ce qu’elle a vécu durant plusieurs mois.

Tout commence lorsque la journaliste de 30 ans décide de se créer un faux profil facebook afin de rentrer en contact avec certains membres de dijhad. Elle crée alors le personnage de Mélanie, 20 ans, convertie à l’islam, et tombe très vite sur une vidéo d’un dénommé Bilel, un combattant de l’Etat islamique en Syrie. Elle partage sa vidéo sur le réseau social et est contactée par le djihadiste, qui lui demande si elle pense un jour venir en Syrie. Ils se mettent rapidement à communiquer par skype afin de préparer l’ «hijra» de Mélanie.

«Il s’agit de l’abandon de sa Terre pour celle des musulmans s’ils sont en danger», détaille Anna Erelle, qui affirme que les vidéos de propagande sont «très» bien faites, notamment celles d’un Marseillais de 23 ans, «beau gosse» et prêchant l’islam en trois langues. «Il a un sourire émail diamant et a un très beau visage. Il enchaîne les vidéos pour louer la Syrie et dire à quel point c’est un pays magnifique, merveilleux et calme, où il faut venir habiter. Et à d’autres moments, il montre des vidéos d’entraînement, qui peuvent faire rêver un adolescent ou un adulte qui serait féru de jeux vidéos. Ils ont des cibles et savent très bien comment les atteindre.»

«La mode? Une ceinture d’explosifs autour de la taille»

photo: robe de soirée violette

«Il n’y a pas qu’un type de djihadiste», détaille Anna Erelle. «Mais la force de Daesh, en plus de ceux qui veulent aller faire le caïd, c’est de dire à ceux qui n’ont pas ça dans leur âme qu’on s’intéresse à eux. ‘C’est peut-être la première fois de votre vie qu’on s’intéresse à vous et vous propose de vous accompagner dans ce qui sera le voyage de votre vie. Une fois que vous serez sur cette Terre, tous vos problèmes seront réglés.’ Une carte postale en fait...»

Un rêve qu’a aussi vendu Bilel à la jeune Mélanie. «Il est prêt à tout pour la faire venir. Mélanie n’a que 20 ans et une personne qui a le double de son âge lui fait des promesses d’horreur si elle reste en France et une carte postale paradisiaque si elle arrive.»

Vêtue d’un voile, Anna Erelle se met alors à parler à Bilel sur Skype. Le djihadiste lui propose rapidement de l’épouser. «La mode, chez toutes ces filles, c’est d’avoir une ceinture d’explosifs autour de la taille», lui lance Bilel. «C’est fou. Il le dit avec un sourire de miel», témoigne la journaliste. «Il trouve ça génial que les femmes fassent cela. C’est ça qui est pire que tout.

Rapidement, Anna Erelle est informée qu’elle discute en réalité avec un Emir ayant notamment combattu en Lybie et en Tchétchénie. «Il dit qu’il est le Français le plus proche du leader de Daesh.»

Le djihadiste informe aussi Mélanie de ce que sera son quotidien en Syrie. «Si tu viens, le quotidien sera très sympa: le matin, tu as étude des langues, l’après-midi tu as tir, et le reste du temps tu fais ce que tu veux. La vie est belle ici et elle ne coûte rien», lui dit-il. «D’après Bilel, la Syrie, c’est le paradis! (...) C’est dur, quand vous êtes rentré dans la peau d’un personnage, de minauder un petit peu.»

«Dans le cas de Bilel, je le soupçonne d’avoir pris l’autoroute de la fortune et de s’être retrouvé sur celui de la religion par défaut», explique Anna Erelle. «J’ai ressenti un sentiment de revanche et une aigreur sur la vie.»

Sous surveillance policière

Évidemment, la journaliste décide un jour de tout stopper, mais reçoit rapidement des menaces. Le journal pour lequel elle travaille lui conseille de changer d’adresse et de numéro de téléphone. Une fatwa est lancée contre Anna Erelle

«Une fatwa c’est: ‘tuez-là, à condition que sa mort soit lente et douloureuse. Elle est plus impure qu’un chien. Violez-la, lapidez-la, achevez-la’», détaille Thierry Ardisson.

«C’est une des menaces que j’ai sur moi aujourd’hui», avoue la jeune femme. «C’est celle qui m’a fait peur. Il y a des vidéos qui vont avec la fatwa. Il y a des informations sur ma vraie vie. Mélanie a quelque part voulu aider quelques destins mais c’est Anna qui en paie les pots cassés.»

Aujourd’hui, Anna Erelle est sous protection policière. «Mais si c’était à refaire, je le referais, à un détail près de sécurité que je garde pour moi.»

voir aussi: robe de soirée grande taille

07:20 | Tags : mode | Lien permanent | Commentaires (0)

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